Les ostéites sont des affections du squelette dues à des germes pathogènes de nature microbienne, parasitaire ou mycosique. Les ostéites microbiennes peuvent s'observer à n'importe quel âge mais se rencontrent plus fréquemment chez l'enfant ou l'adolescent. Les ostéites parasitaires ou microbiennes sont moins fréquemment rencontrées, à l'exception des zones tropicales.
Les ostéoarthrites résultent de l'atteinte microbienne, parasitaire ou mycosique de l'articulation. Il peut s'agir d'une extension à l'articulation d'une ostéite ou d'une atteinte primitive.
La clinique, la biologie et la radiologie constituent le trépied fondamental du diagnostic de ces affections. La radiologie conventionnelle conserve tout son intérêt mais les moyens diagnostiques en imagerie se sont diversifiés et enrichis grâce notamment à la TDM et à l'IRM. L'analyse lésionnelle est affinée et les gestes de prélèvement guidés qui sont nécessaires pour initier une antibiothérapie sont précis et aisés.
Le pronostic de ces affections est fonctionnel et dépend, notamment pour les ostéoarthrites, d'un diagnostic précoce et d'un traitement initial de qualité.
2. DEFINITIONS
Ostéites: terme générique regroupant les infections osseuses traumatiques ou post chirurgicales aiguës ou chroniques.
Ostéoarthrite: arthrite septique avec atteinte osseuse.
Les atteintes osseuses des parasitoses ou mycoses sont appelées ostéites parasitaires ou mycosiques.
3. MOYENS DU DIAGNOSTIC
3.1. Clinique
3.1.1. Ostéites et ostéoarthrites aiguës
Elles se manifestent par un syndrome septicémique avec fièvre, frissons, douleurs articulaires, impotence fonctionnelle et tuméfaction. En cas d'ostéoarthrite aiguë, il s'agit du tableau d'une monoarthrite aiguë septique avec un article chaud et douloureux.
3.1.2. Ostéites et ostéoarthrites chroniques
Les signes sont moins nets. On retrouve une impotence fonctionnelle, des signes locaux moins marqués et un syndrome fébrile plus discret.
3.2. Biologie
En cas de syndrome septicémique, l'hémoculture permet le diagnostic bactériologique (3 hémocultures en période fébrile au minimum). La biopsie de l'os (éventuellement sous guidage par imagerie) pour culture permet le diagnostic de la bactérie en cause. L'os cultivé est broyé. Différentes techniques permettent de décrocher les bactéries adhérentes du prélèvement. Le prélèvement doit toujours être suffisant pour permettre aussi un examen anatomo-pathologique. Les prélèvements des fistules sont intéressants mais il s'agit souvent d'une flore de colonisation secondaire et non pas celle responsable de l'infection. La biopsie ne doit donc pas passer par le trajet fistuleux.
La ponction intra articulaire, dans les premiers jours, permet de recueillir le liquide intra articulaire. La biologie identifie le germe dans ce prélèvement et permet donc une antibiothérapie adaptée (céphalosporines de 3ème génération et fluoroquinolones). Dans les formes chroniques, la chirurgie de "propreté" est parfois nécessaire.
3.3. Imagerie
3.3.1. Radiologie osseuse conventionnelle ou numérique
3.3.1.1. Radiologie osseuse conventionnelle
Elle demeure une méthode de choix pour l'examen des os et des articulations. Les appareillages et la technique générale d'examen des os et articulations sont bien connus. Il est toujours judicieux de disposer de films comparatifs, d'étudier l'os et les parties molles, d'utiliser chaque fois que possible le foyer le plus fin pour améliorer la résolution spatiale. Comme la radiologie osseuse nécessite un contraste élevé, il est préférable d'opérer dans des gammes de tension où l'absorption par effet photo-électrique est privilégiée (en dessous de 70 KV).
Sous amplificateur de luminance, les gestes à visée diagnostique et de prélèvement sont possibles.
3.3.1.2. Radiologie osseuse numérique
La digitalisation de l'image se fait grâce à un amplificateur de luminance (table numérique) ou grâce aux plaques photostimulables à mémoire. Les avantages de ces procédés sont le gain en contraste, la grande latitude d'exposition et la possibilité de traitements d'image (parties molles ou os). Par contre, la résolution spatiale est encore moindre qu'en radiologie conventionnelle.
3.3.2. Échographie
L'échographie étudie les parties molles et notamment les parties molles péri-articulaires, le contenu de l'article et le décollement périosté des ostéites notamment chez l'enfant. On peut guider, si nécessaire, un prélèvement de liquide intra-articulaire
3.3.3. Tomodensitométrie
La tomodensitométrie permet une étude fine de la structure de l'os, surtout avec les scanners récents à haute résolution spatiale, une étude des parties molles périarticulaires et une étude du contenu articulaire.Sur les zone d'intérêt, l'étude doit se conduire en coupes fines (tous les 3 à 5 mm, en utilisant un filtre de résolution spatiale maximale). Des reconstructions dans tous les plans de l'espace sont possibles dans un temps bref avec les machines modernes après un reformatage.
3.3.4. Imagerie par résonance magnétique
L'imagerie par résonance magnétique détecte précocément les anomalies de signal de l'os (hyposignal en T1, hypersignal en T2) ou de l'articulation atteinte. Ceci est bien visible pour les spondylodiscites.L'injection de gadolinium majore l'hypersignal des zones atteintes. L'IRM montre bien l'extension du foyer dans la médullaire de l'os et vers l'interligne articulaire et les collections liquidiennes. L'utilisation de séquences avec suppression du signal de la graisse permet l'exacte délimitation du foyer infectieux dans l'os.(séquence inversion récupération avec annulation des graisses)
Dans les affections chroniques, l'IRM délimite l'étendue des lésions intra-osseuses et apprécie l'évolution des foyers aigus quiescents. Elle permet de répérer les séquestres intra osseux et les abcès des parties molles en les différenciant d'une simple cellulite.
3.3.5. Scintigraphie
4. OSTEITES INFECTIEUSES
4.1. Définition
On appelle ostéite infectieuse toute infection de l'os quelles que soient les modalités de l'infection et le germe en cause. On restreint l'usage du terme ostéomyélite aux seules infections d'origine hématogène.
Ces affections sont plus fréquentes en Afrique qu'en Europe. Elles touchent volontiers l'enfant et sont plus rares chez l'adulte.
Les germes en cause sont variés, mais on retrouve surtout du staphylocoque (63 %), du steptocoque (14 %), du bacille de KOCH. Dans un bon nombre de cas (15 %), le germe n'est pas retrouvé.
Il est classique aussi de rencontrer chez les sujets atteints de drépananocytose ou de thalassémie des ostéites à Salmonella et à Haemophilus. Le risque de développer une ostéomyélite au cours de la drépanocytose serait multiplié par 100.
4.2. Physio-pathologie
Le germe se localise préférentiellement à la métaphyse et crée à ce niveau un foyer infectieux qui va s'étendre vers le cortex par les canaux de Havers. Il se constitue un abcès sous périosté, limité en haut par l'attache du périoste au cartilage de conjugaison mais qui peut s'étendre librement vers la diaphyse. L'extension du foyer infectieux peut se faire vers l'articulation lorsque la métaphyse est intra capsulaire ou par les vaisseaux au cours de la première année de vie car ceux ci pénètrent le cartilage de conjugaison vers l'épiphyse.
La réparation spontanée ou sous traitement fait apparaître des séquestres intra-osseux dans la zone de nécrose initiale, une néoformation à partir du périoste (épaississement cortical) et une réaction de l'os sain qui se condense à proximité des lésions.
4.3. Ostéite staphylococcique (ostéomyélite)
Forme aiguë : les lésions siègent dans la métaphyse fertile. La radiologie est en retard sur la symptomatologie clinique car elle ne montre aucune lésion au début. L'étude attentive peut cependant montrer une densification des parties molles, un épanchement intra-articulaire. L'IRM si elle était pratiquée montrerait un hyposignal T1 et un hypersignal T2. L'échographie montre la fine lame de liquide décollant le périoste et traduisant l'abcès sous périosté (fig. 1, 2 et 3).
Figure 1 : ostéomyélite du cubitus.
Après 8 à 10 jours d'évolution, apparaissent une déminéralisation et des lacunes confluentes, multiples. L'os prend alors un aspect "vermoulu". Le périoste décollé s'épaissit. L'articulation de voisinage est respecté si le cartilage de conjugaison joue son rôle de barrière. Ceci n'est pas le cas des enfants en dessous de 1 an ou des patients dont le cartilage de conjugaison est intra articulaire.
Figure 2 : Spina ventosa.
Figure 3 : Abcès de Brodie
Forme chronique : Elles résultent d'un traitement mal conduit. On en distingue 3 formes :
- l'ostéite chronique hyperostosante (ou éburnante) qui détermine une hyperostose dense renfermant de petites zone claires, bien mises en évidence par la TDM.
- l'abcès de Brodie qui donne une lacune centrale d'un os long. Cette image lytique est associée à une réaction périostée lamellaire. Le diagnostic différentiel avec un ostéome ostéoide peut exiger une ponction guidée diagnostic.
- l'abcès ossifluent ou abcès extrapériosté qui donne une collection visible par ultra-sons et une réaction périostée lamellaire pouvant rappeler la tumeur d'Ewing
4.4. Évolution radiologique
4.4.1. Restitution "ad integrum"
Elle se produit chaque fois que le diagnostic a été précoce et l'antibiothérapie correctement instituée. L'os retrouve un aspect radiologique strictement normal.
4.4.2. Evolutions prolongées. Séquelles
Certaines ostéites présentent des évolutions très prolongées, nécessitant parfois un curage chirurgical. L'examen radiologique objective le foyer suppuratif et les séquestres. La fistulographie ou l'IRM (quand il n'y a pas de matériel métallique) montrent les foyers intra-osseux.
Les séquelles sont orthopédiques: raccourcissement, désaxations.
4.5. Formes radiologiques selon les germes en cause
L'ostéomyélite staphylococcique est la forme classique de description. L'ostéite tuberculeuse (bacille de Koch) est moins fréquente mais on la rencontre toujours. Elle se produit par voie hématogène et se manifeste cliniquement et radiologiquement après une longue évolution. Elle est d'abord raréfiante puis hyperostosante. Le foyer contient un séquestre que la radiologie identifie. Les localisations électives sont les os courts, les os plats et les zones spongieuses des os longs. La trochantérite bacillaire est une forme classique de l'ostéite bacillaire. Le spina ventosa est une ostéite bacillaire des os longs des mains et du pied.
Chez le petit enfant atteint de spina ventosa, on distingue une lacune médullaire élargissant l'os entourée d'une réaction périostée modérée. Dans l'évolution, on assiste à l'apparition d'un séquestre, d'une rupture du périoste, d'une infection secondaire entraînant une sclérose.
5. OSTEOARTHRITES (fig. 4)
5.1. Physiopathologie
Figure 4 : ostéoarthrite métacarpo-phalangienne.
- inoculation directe (ponction articulaire au cours d'infiltrations, d'arthrographies, arthroscopies, traumatisme avec ouverture du foyer, intervention chirurgicale)
- extension par contiguité d'un foyer septique sans atteinte préalable de l'os (ulcérations traînantes d'origine vascualire ou neurologique)
- contamination hématogène lors de bactériémie ou de septicémie. Cette atteinte par voie hématogène est la plus fréquente.
5.2. Epidémiologie
Les ostéomyélites se rencontrent aux deux extrêmes de la vie (jeune garçon ayant subi des microtraumatismes infectés par le staphylocoque, vieillard présentant une bactériémie à germes gram négatif).L'évolution sociale fait apparaître un nombre croissant d'ostéomyélites chez le toxicomane consécutives aux bactériémies résultant de l'injection intra veineuse de drogues. Les ostéoarthrites sont l'apanage des sujets âgés lors de pose de prothèses articulaires ou d'infiltrations.
5.3. Aspects radiologiques
5.3.1. Hanches
Au début : les signes radiologiques sont toujours en retard par rapport aux signes cliniques. Attendre leur apparition pour établir le diagnostic d'arthrite septique expose à des séquelles fonctionnelles.
L'examen le plus sensible est la scintigraphie, mais l'hyperfixation observée n'est malheureusement pas spécifique.
L'IRM montre des anomalies du signal médullaire et la présence d'un épanchement intra-articulaire. Les anomalies de signal médullaire sont un hyposignal en T1 et hypersignal en T2. L'épanchement intra articulaire est en hypersignal T2. L'IRM est très sensible à cette phase précoce mais le geste diagnostique essentiel est la ponction articulaire guidée sous écho ou en radiologie conventionnelle qui ne doit pas être différée.
Par la suite : on observe un élargissement de l'interligne articulaire (dû à l'épanchement), une déminéralisation de l'os péri-articulaire et une disparition du contour céphalique.
A la phase d'état surviennent des destructions des structures osseuses articulaires (tête, col, cotyle). Des débris osseux sont visibles dans les tissus mous qui sont oedématiés. Le scanner montre parfaitement bien les lésions osseuses et des parties molles.
La coxalgie, ostéoarthrite tuberculeuse de la hanche, est moins fréquente que les autres étiologies. Elle demeure cependant la deuxième localisation ostéo-articulaire de cette maladie après l'atteinte du rachis.L'évolution est plus lente qu'avec les autres arthrites septiques. Elle se fait vers vers la destruction des surfaces articulaires. L'examen tomodensitométrique montre des géodes osseuses, des séquestres, un épanchement intra-articulaire et des abcès des parties molles ou du psoas. Ces fusées septiques, à caractère liquidien, sont bien identifiées par l'IRM.
5.3.2. Articulation sterno-claviculaire
L'atteinte de cette articulation est rare (à l'exception des atteintes inflammatoires). Un cas d'ostéoarthrite par salmonella typhi A a été décrit.
5.3.3. Rachis (spondylodiscites)
Les spondylodiscites bacillaires (Mal de Pott) sont en déclin. Les spondylodiscites à germes banals sont beaucoup plus fréquentes (staphylocoque, bacilles gram négatif, germes aérobies gram négatif). La contamination s'effectue à partir d'une porte d'entrée uro-génitale, cutanée ou parfois après chirurgie du rachis ou chymonucléolyse. Les adultes sont plus fréquemment touchés notamment les transplantés. Les signes cliniques annonciateurs sont la rachialgie, le syndrome infectieux, les radiculalgies, la raideur rachidienne à l'examen (fig. 5 et 6).
Dans tous les cas, les signes radiologiques classiques sont retardés par rapport à la clinique.
- le pincement discal (constant)
- la déminéralisation des pièces osseuses somatiques, voire des géodes intrasomatiques
Figure 5 : spondylodiscite.
Figure 6 : spondylodiscite et IRM.
L'imagerie en coupe (TDM ou IRM) est contributive pour l'analyse des lésions. L'IRM, grâce à l'étude dans les 3 plans de l'espace, montre de façon synthétique les lésions ostéo-articulaires et le fuseau paravertébral. Le disque est en hyposignal T1 et hypersignal T2 ainsi que les plateaux vertébraux d'encadrement. La collection paravertébrale est en hypersignal T2. La TDM permet la ponction intradiscale et somatique et l'identification du germe.
Ces lésions évoluent vers la destruction vertébrale, la constitution d'abcès péri-vertébraux, d'une construction osseuse périfocale. A long terme, sans traitement, le mode de stabilisation est le bloc vertébral spontané avec trouble de courbure définitif (gibbosité) et séquelles neurologiques. Sous traitement, on aboutit à une restitution ad integrum ou une stabilisation précoce des lésions sans séquelle orthopédique ou neurologique. La modification du signal IRM vers la normalité permet à terme d'affirmer la guérison de la spondylodiscite.
Dans la spondylodiscite bacillaire, la séméiologie radiologique est la plus nette. L'évolution est lente, l'ostéocondensation tardive. La séméiologie IRM des spondylodiscites bacillaires a fait l'objet d'analyses récentes. L'atteinte est dorsale basse et plurifocale. Les anomalies de signal vertébral sont iso ou hyper en T1, hypersignal franc en T1 après gadolinium et T2. L'atteinte discale est moins fréquente qu'il n'était classiquement admis. Par contre, le spondyle est fréquemment atteint ainsi que l'arc postérieur. Les abcès paravertébraux et épiduraux sont fréquents et bien démontrés par l'IRM.
5.3.4. Sacro-iliaques
Les sacro-iliaques sont le siège d'ostéoarthrites bacillaires ou à germes banals. L'arthrite sacro-iliaque mélitococcique est classique mais rare. Habituellement, les lésions sont unilatérales ce qui est un élément de diagnsotic différentiel important avec les sacro-iliites.
Le tableau radiologique habituel montre en premier lieu un élargissement des berges articulaires, puis des érosions articulaires suivies de géodes ou de séquestres que la tomodensitométrie objective parfaitement. En effet, au scanner la lecture de cette articulation est particulièrement facile et comparative. L'articulation peut présenter à un stade tardif non traité des dislocations et des abcès ossifluents sont visibles. Des ponctions guidées sont aisément réalisables. Par la suite, une réparation peut s'établir. Elle se fait par ankylose si le traitement a été mal conduit ou tardif. Elle se fait sans séquelle si le traitement a été bien conduit.
5.3.5. Articulations des membres
Genou : l'épanchement est facile à reconnaître aussi bien en radiologie classique (opacité sus et retro-rotulienne; dépalacement de la rotule vers l'avant) qu'en échographie. La ponction articulaire aussitôt pratiquée permet d'éviter l'apparition de signes radiologiques de la phase d'état. Ces arthrites sont souvent iatrogènes ou post traumatiques.
L'ostéoarthrite bacillaire réalise le tableau de la tumeur blanche du genou. Le genou est gros, les parties molles sont tuméfiées. Il existe une amyotrophie quadricipitale et des destructions osseuses sur les plateaux tibiaux et les condyles. Les séquelles ne sont pas rares.
Epaule : l'ostéoarthrite de l'épaule est le plus souvent iatrogène.(injection de corticoides). Elles peuvent aboutir à des destructions totales de la tête humérale par fonte des structures osseuses articulaires.
L'ostéoarthrite bacillaire de l'épaule est d'aspect particulier. Il existe en effet une lacune céphalique au dessus du massif trochitérien
6. ASPECTS RADIOLOGIQUES DE MYCOSES ET PARASITOSES
6.1. Parasitoses
6.1.1. Tréponématoses : syphilis et pian
La syphilis osseuse est rare en Europe. Elle est hyperostosante et diaphysaire. On distingue la syphilis congénitale et la syphilis acquise. La syphilis congénitale est une foetopathie parasitaire résultant d'une contamination du foetus par la mère entre le 5ème et 9ème mois de la vie intra-utérine. Elle se manifeste radiologiquement par une ostéochondrite avec des irrégularités de la ligne d'accroissement et des anomalies de la métaphyse. Le diagnostic différentiel se pose avec le rachitisme et le scorbut. On observe également chez ce nourrisson une périostite diaphysaire ossifiante et par des érosions et petites lacunes. La syphilis acquise se traduit radiologiquement par des périostoses irrégulières et mammelonnées touchant le tibia, associées à des images lacunaires. Des ostéites localisées creusées de lacunes "gommeuses" sont également notées. Les os plats et les os de la face sont également touchés.
Le pian (tréponématose endémique tropicale) entraîne des ostéopériostites proches de celles de la syphilis. Elles intéressent les os longs et déforment le tibia "en lame de sabre". Une particularité du pian est de donner une ostéopériostite des phalanges des mains et des pieds.Au niveau de la face, il se traduit cliniquement par la gangosa, rhinopharyngite mutilante, entraînant des lésions lytiques du maxillaire supérieur.
6.1.2. Echinoccocose osseuse
Le parasite (embryon hexacanthe) se loge dans de multiples vésicules de la spongieuse et de la compacte osseuse : forme multidiverticulaire. Il peut se loger dans une seule cavité : forme uniloculaire.L'infection qui se greffe à l'atteinte parasitaire entraîne une ostéite parasitaire. Des abcès ossifluents extra-osseux sont parfois associés.
Cliniquement, la maladie est révélée par des douleurs, une tuméfaction locale voire une fracture spontanée.
Radiologiquement, on observe une seule lacune comportant des logettes (forme mono ou peauci lacunaire), des lacunes multiples, irrégulières qui détruisent la corticale. En IRM et TDM, le contenu est liquidien.En cas d'infection, les lacunes sont irrégulières, bordées d'un liseré opaque avec épaississement de la corticale et appositions périostées.
Les os atteints le plus fréquemment sont l'ilion (la propagation à la hanche est possible entraînant une arthrite parasitaire destructrice), le rachis dorsal (lacunes du spondyle et de l'arc postérieur avec tassement vertébral) et les côtes. Le crâne est rarement atteint.
6.2. Mycoses
6.2.1. Mycoses locales : mycétomes
Ce sont des atteintes parasitaires pseudo-inflammatoires et pseudo-tumorales provoquées par la prolifération de champignons (mycétomes) à l'intérieur des tissus puis de l'os en profondeur. On observe une fistulisation par de multiples pertuis qui laissent sourdre des grains noirs, blancs et rouges. L'atteinte du pied est préférentielle. Elle donne le (ostéite, ostéoarthrites, abcès, fistules). Les os atteints sont les os longs,le rachis, pied de Madura. Ces mycétomes se rencontrent dans les zones tropicales à climats secs et chauds chez les ruraux à la suite d' inoculation locale.
Le malade consulte pour une gêne fonctionnelle et des fistules du pied. L'examen radiologique montre des lésions destructrices majeures de la partie moyenne du squelette du pied (tarse antérieur et cunéiformes) associées à des images de construction traduisant la réaction de l'os face à l'inflammation. Le squelette de voisinage est déminéralisé. Les parties molles sont globalement tuméfiées.
6.2.2. Mycoses généralisées: histoplasmose
L'histoplasmose ou Maladie de Darling atteint le poumon, les viscères et l'os. Dans ce cas, les lésions sont dues à Histoplasma duboisi que l'on rencontre surtout en Afrique. Les tableaux radiologiques observés sont proches de ceux des ostéites tuberculeuses l'omoplate.
6.2.3. Mycoses généralisées à localisations osseuses plus rares : crytococose (torulose), blastomycose, coccidioïdomycose, actinomycose
La coccidioïdomycose, sous sa forme chronique, atteint le rachis, le bassin, les côtes, le crane, les os longs, les petits os des mains et des pieds. Les lésions sont destructrices ou pseudo-ostéomyélitiques au niveau des os longs.
La blastomycose (blastomyces dermatidis) donne surtout des lésions destructrices . Ces atteintes osseuses coexistent avec des lésions cutanées et viscérales. La recherce de blastomycès dermatidis dans les produits de biopsie ou de ponction de collection, les urines, le LCR, les crachats permet le diagnostic.
L'actinomycose (actinomyces israeli) peut entraîner des lésions osseuses primitives ou secondaires. Dans les lésions secondaires, l'os est atteint par une lésion de contiguité (maxillaire inférieur, côte, sternum,rachis). Il s'agit d'érosions à contours flous avec apposition périostée. En cas de lésion primitive, l'atteinte de l'os résulte d'une dissémination hématogène. Les foyers préférentiels sont les maxillaires, le rachis, les os longs des membres. Les lésions sont raréfiantes et destructrices. Elles simulent une ostéite aiguë sur les os longs des membres. Le diagnostic repose sur l'issue des grains jaunes à partir des fistules ou des collections incisées.
7. DIAGNOSTIC RADIOLOGIQUE DIFFERENTIEL DES ARTHRITES ET OSTEOARTHRITES
En cas de monoarthrite aiguë, il faut éliminer une ostéoarthrite chimique, microcristalline, mécanique pseudo-inflammatoire. La biologie joue un rôle essentiel mais la radiologie en montrant les signes classiques d'une affection en cause est également contributive. En face d'une monoarthrite dans un contexte inflammatoire et infectieux, la constatation d'un article radiologiquement normal en début d'évolution est un argument supplémentaire pour suspecter une ostéoarthrite infectieuse et pratiquer une ponction de l'articulation atteinte à la recherche du germe causal;
L'ostéomyélite aiguë du jeune enfant ou du nourrisson amène à discuter inévitablement le sarcome d'Ewing. Les arguments à prendre en compte en faveur de l'ostéomyélite sont le retard des lésions osseuses par rapport à la clinique, la présence de séquestres au sein de l'os à la phase d'état, l'abcès sous périosté visible en échographie, l'absence de tumeur des parties molles.
Dans l'abcès de Brodie, on peut être amené à envisager l'existence d'une lacune bénigne type ostéome ostéoide. Mais une lacune mal limitée avec réaction périostée peut faire évoquer une lacune métastatique,un ostéosarcome ou un sarcome d'Ewing.
8. CONCLUSION
Sur le plan épidémiologique, les ostéites et ostéoarthrites bacillaires en régression par rapport aux lésions dues à des germes banals. Il faut toujours penser à l'étiologie mycosique devant toute lésion osseuse ne cadrant pas avec les manifestations cliniques, radiologiques et évolutives.
Le retard d'apparition des signes radiologiques sur la clinique est un fait confirmé qui impose un prélèvement intra-articulaire souvent guidé par l'échographie ou par la radiologie. Cette attitude permet un diagnostic précoce et l'institution d'une thérapeutique efficace permettant la guérison sans séquelle.
La radiologie conventionnelle a été enrichie des possibilités du scanner et de l'IRM. Elle intervient à tous les stades de l'évolutions des ostéites et ostéoarthrites. Son rôle est déterminant en matière de diagnostic positif, différentiel et évolutif.
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